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La préparation

Au départ, en point de mire de notre 2ème marathon au programme 2008, il y avait le Mont Saint-Michel dont la statue culmine à près de 170 mètres.
Certes, nous n'avions pas prévu d'escalader l'abbaye mais que s'est-il donc passé dans nos petites têtes pour que les 4810 mètres enneigés du Mont-Blanc nous paraissent plus attirants que les plumes de l'archange qui orne le dit édifice.
La faute à CLM ? sûrement. Récits et incitations diverses n'ont pas manqués. J'ai même reçu le DVD de la course 2007 dans ma boîte aux lettres (conspiration JC-Bogeymanesque) !
Influençables ? pas de doute, parlez-nous d'une belle course avec à la clé un savoureux rendez-vous de coureurs particulièrement attachants : 2 minutes suffiront pour prendre une décision.
Celà dit, le Mont-Blanc, on ne l'aura qu'en point de mire mais il faudra quand même hisser nos fesses à plus de 2000 mètres d'altitude à l'issue des 42 Km de rigueur sur des chemins de montagne.
Autre course, autres objectifs, autre préparation : toutes mes bases à revoir et un défi d'un nouveau genre pas fait pour me déplaire même si la difficulté, sans vraiment me faire peur, m'inquiète un peu.

PS : quand je dis 'nous', j'entends 'moi et mon double'... et Maryline et Isabelle et Gaël et Nicolas.
* "Plus vite, plus haut, plus fort" : la devise olympique proposée par le baron Pierre de Coubertin en 1894 et bien adaptée en cette année 2008.
  •   Janvier : parler pour dédramatiser
  • 11/01 : pas encore inscrit et la tête plus proche de Barcelone que du Mont-Blanc. Mais tout ça commence à me trotter dans la tête depuis quelques jours. Il est temps d'aller aux renseignements.
    Voici quelques chiffres, pas pour me faire peur, mais juste pour appréhender le niveau du défi car, là, on ne joue plus sur les terrains habituels.
  • Dénivelés : 2 240m en positif (quand ça monte) et 1 190m en négatif (quand ça descend) pas besoin de vous faire un dessin. On commencera donc au départ de Chamonix à 1 035m d'altitude pour finir à 2 070m à Planpraz en aillant fait une ascension préliminaire au col des Montets (1461 m - Km 15) puis à celui des Posettes et ses 1 997m (Km 25). Brrr...
  • Terrains : 16% de route seulement, 32% de sentiers et 52% de chemins forestiers... bonjour la chlorophylle !
    Il me semblait indispensable de faire l'acquisition de chaussures de trail pour plus de maintien et d'accroche sur ces sentiers et chemins de montagne.
    Profitant donc des soldes, j'ai investi dans une paire de ASICS Gel TRABUCO 10WR plus légères que je n'imaginais et trés confortables à mon goût : ce qui me conviendra parfaitement selon le vendeur. Espérons...
  •   Février : concrétiser
  • 09/02 : réservation de 9 nuits en résidence Maeva La Rivière du 26 juin au 5 juillet et...
    ... et
    inscription en ligne pour le marathon avec participation au buffet d'après marathon (40 €).
    Cette fois-ci, impossible de reculer !
    La Rivière La Rivière
  • 15/02 : mon double semble inquiet voire déçu de ne trouver côte à son pied pour préparer cette épreuve dans laquelle il m'a pourtant embarqué. C'est vrai que ni la région de St-Herblain ni le bois de Vincennes ne sont réputés pour leurs longs et abrupts dénivelés.
    En fouillant dans mes archives, j'ai retrouvé cet article paru en 2006 dans le magazine Running. Il traite notamment de la manière de se préparer physiquement pour des trails en montagne même lorqu'on ne s'entraîne pas dans une région vallonée.
    Voilà donc de quoi nous forger des quadriceps d'acier !!
    S'entraîner même en plaine : S'entraîner même en plaine - Page 1Page 1 S'entraîner même en plaine - Page 2Page 2
  •   Mars - Avril : Barcelone et reprise et...
  • 02/03 : marathon de Barcelone, celui-là était au programme et, ma foi, je ne regrette pas de l'avoir fait. Pas de grosse performance mais un plaisir immense.
  • 23/03 : Le semi-marathon de St-André des Eaux a été le théatre d'un chrono de rêve 3 semaines seulement après Barcelone. 1h28'44", record amélioré de 1'12" !
  • 06/04 : trois semaines maintenant que j'ai repris de manière assidue l'entraînement y ajoutant progressivement des séries de marches et quelques séances d'abdos et de gainage.
    Entre temps, Yannick, copain de club, m'a proposé de l'accompagner sur le marathon de Nantes qu'il compte boucler aux alentours de 4h00 avec Yoann. 3 semaines et de nombreuses hésitations plus tard, rassuré par deux longues sorties en douceur, j'ai finalement décidé de le faire : au diable la sagesse, je me suis inscrit en ligne hier soir !
    En regardant le marathon de Paris ce matin à la télé, je me suis senti des ailes. Je réalise quand même que je prends quelques risques. Espérons que le physique ne me contredira pas dans les semaines à venir...
  • 20/04 : satisfaction que d'avoir bouclé ce marathon de Nantes en 3h59'32" sans grosse fatigue. Objectif atteint en 3h59'32", beaucoup de tchatche tout le long mais un marathon finalement peu enthousiasmant malgré sa nouvelle formule.
  •   Mai : let's go again !
  • 05/05 : premier entraînement de ma préparation 'officielle'. Mon plan habituel sur 8 semaines avec une bonne dose de feeling, un peu moins de travail de vitesse mais plus de côtes, escaliers, renforcement musculaire et de longueur dans les sorties en endurance. Tout ça pour tenir le coup sur un effort que j'estime avoir maintenir entre 5 et 6 heures.
    Pour suivre ma préparation : >>> consultez mon carnet d'entraînement <<<
  • 11/05 : premier des 2 trails mis à mon programme pour cette préparation. J'ai testé mes chaussures sur les 19,9 Km de la course nature de Bouguenais avec satisfaction. Côté course, un bon classement malgré une petite forme et une forte chaleur.
  •   Juin : droit dans le mur ?!?
  • 01/06 : à mi-chemin de ma préparation 'officielle', je me suis lancé sur un deuxième trail : "Entre Loire et côteaux", 19 km à Ancenis. Un temps pourri et un parcours magnifique mais boueux, glissant bref plutôt sélectif m'ont permis de rentrer satisfait d'avoir bien 'tenu' malgé ces conditions de courses difficiles.
    Les premiers bénéfices de ma préparation renforcée en escaliers, côtes et endurance semblent bien là. A confirmer.
  • 01/06 : le parcours du marathon 2008 est sorti. Seulement 4 ravitaillements complets en course (plus celui à l'arrivée), un point d'eau au cols des Posettes. Il va falloir générer cette semi-autonomie. Le CamelBak achété il y a deux semaines (réserve de 1,5 litre) s'avèrera utile.
  • 02/06 : suite au petit décrassage de ce soir, je vais lever le pied car une vive douleur dans le mollet gauche m'a contraint à écourter ma sortie : même symptôme qu'en janvier, un élongation, rien de grave, un peu de repos s'impose.
  • 07/06 : toujours au repos, je compense avec du vélo et des séances de renforcement musculaire.
    Voilà ce que j'ai pu lire sur le site du marathon aujourd'hui : "le nouveau parcours du Marathon vous offre un dénivelé positif de 2445m et un dénivelé négatif de 1480m". Que dire, 200 m de dénivelé positif en plus cette année, ben voyons ?!?
  • 17/06 : le spectre de l'abandon plane dangereusement au dessus de moi. Le repos que je me suis imposé ne m'apporte aucun soulagement. Pire, les deux séances de home trainer que j'ai faites pour garder un peu la forme semblent me faire plus de mal que de bien : j'ai mal même en marchant !
    Dernier espoir : repos total jusqu'au 28 en espérant faire passer la douleur.
    Et là, même en restant derrière avec un rythme d'escargot, sans entrainement pendant 4 semaines, je me vois mal faire 42 bornes avec 2500m de D+.
    Moral ultra dans les chaussettes...
  • 24/06 : le repos porte ses fruits. Mon mollet n'est plus douloureux et retrouve une certaine souplesse lorsque je l'étire. J'ai hésité à faire quelques foulées 'pour voir' mais j'ai trop peur de raviver le mal.
    Alors, je préfère encore arriver au jour J sans être blessé quitte à être trop juste côté condition physique : la fatigue, j'arriverai peut-être à la gérer. J'étais à deux doigts de ne pas prendre le départ mais, finalement, je veux faire partie de la fête... au moins pour l'ambiance du départ, les premiers kilomètres et le plaisir de tchatcher un peu avec mon double. Tout le reste sera du plus qu'il me faudra savourer avec cette petite crainte permanente de voir ressurgir la douleur.
    Demain, je préparerai mes affaires... comme si...
  •  Météo :
  • Au 24 juin, prévisions météo pour dimanche 29 juin sur fr.weather.com :
    Météo peu nuageux, 13 - 23°C .
  •   Organisation
  • Voyage : en voiture (environ 900 km)
  • Hôtel : 9 jours en résidence Maeva La Rivière du 26/06 au 05/07 (472 € - 10% avec chèques vacances).
  •   Infos marathon
  • Départ : 7h00 de Chamonix (inscription : 40 €).
  • Le parcours :
Cliquer pour afficher en taille réelle
Le dossard

"Gradatim vincimus"

Comme une galère...
mais en plus joli !

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La médaille

Le récit

J'avais déjà connu quelques incidents lors de mes préparations pour les marathons de Londres et Barcelone mais jamais je ne m'étais retrouvé dans un tel pétrin à la veille d'un grand rendez-vous.
Une vilaine blessure au lendemain du trail d'Ancenis couru dans des conditions dantesques et ma préparation spécifique est tombée à l'eau.
A deux semaines du grand jour, j'optais la mort dans l'âme pour un repos total ayant constaté que même trés lentement mon mollet restait douloureux et que le vélo, loin d'arranger les choses, n'avait fait que les empirer.
C'est donc la tête remplie de doutes, le moral au plus bas et avec la perspective de l'abandon que je pris l'autoroute pour Chamonix avec ma petite famille en ce jeudi 26 juin.
Trouvée dans la galerie photos du site du marathon
  •  Le plein d'énergie positive :

  • Pour commencer, un appartement plus que correct et bien situé au coeur de la ville : à 5 minutes à pied du départ du marathon.
    Je me dis déjà que si je rate ma course, au moins nous passerons de bonnes vacances dans ce cadre majestueux en plein coeur des Alpes.
  • Mon moral gagnera quelques points vendredi. Tout d'abord, alors que je tente incognito de me morfaller une mega glace, je ferai la connaissance de Pascal et Basilio : c'est eux qui m'ont reconnus grace à mon avatar sur CLM. Un bon moment à tchatcher : tchatcher, le verbe qui va marquer lourdement ce récit, je vous préviens d'avance !
    100 mètres plus loin, je retrouverai un copain, venu lui courir le cross. Re tchatche !
    Que dire de l'arrivée au bout de la rue : éblouissant dans son carosse bleu, mon kéké de Double.
    La soirée se finira en pré-rendez-vous CLM à La Potinière, restaurant où je retrouverai Bogeyman (à qui je dois en partie ma présence ici), Juanita, PConvert, La Tortue, Catson, Basilio, Rplane et ferai enfin la connaissance de Edhistoire.
  • Alors que j'avais refusé d'aller tester mon mollet avec Basilio et Catson vendredi soir de peur de me faire mal, samedi, nous partirons mon Double et moi pour 30 minutes d'un footing trés léger. Pas vraiment de bonnes sensations mais pas de douleur et surtout un grand moment de détente. Juste le temps pour mon Double de me vanter les mérites de son Garmin S305 et pour moi d'oublier que j'étais à deux doigts de ne pas me présenter au départ du marathon le lendemain. Moral ++++
  • Nous irons chercher notre dossard en fin de matinée afin de pouvoir nous reposer un peu dans l'aprés midi. Je récupèrerai donc le N°256 et un superbe maillot : ce maillot que je craignais tant de ne pouvoir porter plus tard avec la fierté de celui qui a bouclé l'épreuve.
    Après une petite sieste, je préparerai mes affaires pour le lendemain : toujours ça de moins à faire si on se couchait tard.
    Semi suffisance qu'ils annonçaient sur le site, c'est à dire seulement deux ravitaillements 'solides' et trois 'liquides'. Je m'étais donc équipé d'un Camelbak, un vrai, avec réserve de 1,5 l d'eau 'enrichie'. J'avais glissé dans sa pochettes quelques pâtes de fruit et gels coup de fouet en prévision d'une longue, trés longue épopée.
  • Un apéro CLM à 17h30, histoire de se mettre dans l'ambiance et une heure plus tard direction Le Bartavel.
  • Record battu à la pasta CLM en ce samedi soir. Plus de 40 convives, connus ou non. J'ajouterai à mon carnet de connaissances CLM, Danye (qui nous a organisé un super rendez-vous), Fabdulux, Barbie. Retrouverai RunninDoum, Catson et Oliv venus comme moi en famille.
    Sagement commencé avec un trio de pâtes (spécialité pas inscrite à la carte, résultat d'une redoutable alliance entre moi, mon Double et ma Moitié), notre sage repas sportif dérapera en fin de course avec les calissons de La Tortue, les palmitos de Juanita et les canelés de RunninDoum. Rien à perdre pour moi alors j'en ai bien profité !
    Contrairement à notre longue soirée barcelonaise, nous ne serons pas au lit trop tard : il est 11h lorsque je me glisse sous les draps et j'ai retrouvé un moral d'acier. Quelque part, dans ma tête, une petite voix me dit : 'tu peux y arriver, tu dois essayer'.
  •  Le marathon :

  • 3h00, réveillé, déjà. Mais c'est une habitude pour moi. Un peu de patience, une douche bien chaude et, le temps de me préparer, je frappe à 5h30 précises à la porte N°302. Mon Double à peine réveillé m'ouvre les portes de son appartement.
    Pour ne pas réveiller les miens, nous avions décidé, en l'absence de Maryline, de prendre notre petit déjeuner en tête à tête. Trois quarts d'heure plus tard, nous prendrons le chemin de la place du Triangle de l'Amitié.
    Là, nous déposerons le sac contenant de quoi nous couvrir à l'arrivée puis partirons à la recherche des CLM pour la traditionnelle séance photo.
    Comme promis la veille, mais à moins de cinq minutes du départ, Bogeyman arrivera avec sa bande élastique magique et m'en entourera la base du mollet. Je pense sincèrement que ce petit bout de tissu élastique m'a bien aidé dans mon entreprise. Merci et re merci Bogey !
  • 7h00, tout comme nous, un hélicoptère en vol stationnaire attend le coup de feu libérateur. Quelques encouragements du speaker pour chauffer la foule des coureurs et nous voilà partis.
    Ma stratégie est simple. Pour tenir, je dois courir lentement et ne pas hésiter à marcher dans les côtes trop abruptes. Alors, je pars lentement. Mon double et La Tortue me lâchent rapidement. Je me retrouve aussi vite en queue de peloton. Quelques courageux sont venus nous encourager dans les rue de Chamonix. J'apprécie mais reste concentré.
  • Trés vite nous quittons la ville, le bitume cédant à des chemins bien pratiquables et aux premières montées. Je suis... dernier ! Mais je m'en moque : je veux finir et j'ai deux obstacles à surmonter : mon mollet que je dois ménager mais également les barrières horaires pour ne pas me faire éliminer.
    Devant moi, ça ne court pas trop vite et ça parle beaucoup, alors je m'accroche et je m'immisce dans les conversations.
    Tout comme moi, les derniers marchent dés que ça monte un peu trop et franchement, ça me remonte le moral. Nous traverserons de petits hameaux pittoresques pour attaquer la première difficulté, Argentière et ses 1250m.
    Comme je parle beaucoup à tout le monde, je ne vois pas trop le temps passer. Je cède les dernières places à ceux qui font des arrêts ou se mettent à marcher alors que j'estime encore pouvoir courir.
    Tous ces coureurs d'horizon bien différents, je les retrouverai au fil de la course et des ravitaillements, certains même jusqu'à l'arrivée où une belle embrassade et la photo d'imposeront!
  • Je n'ai pas appris la carte du parcours par coeur et je n'ai aucune idée de ma vitesse ni du nombre de kilomètres parcourus. Pour l'instant, ça ne me gène pas mais sur la fin je trouverai ça pénible.
  • En fait, je prends mon pied... dans les descentes. Mon mollet n'y est pas trop sollicité alors, j'accélère un peu et double quelques coureurs. Au 14ème km, après le col des Montets (1461m), je me laisse porter par une longue descente. Un peu trop décontracté, moins vigilent, je prendrai ma première gamelle du jour, mon pied gauche heurtant un big cailloux. A genou dans l'herbe, plus de peur que de mal, avertissement sans frais !
    A Argentière, premier ravitaillement en eau et boisson énergétique, je repère mon double et La Tortue. Nous ne nous quitterons plus jusqu'à l'aiguillette des Posettes, tchatchant et re tchatchant à outrance. Quelle rigolade que cette ascension jusqu'aux Posettes.
    Pourtant les chemins sont devenus étroits et caillouteux, le pourcentage s'est considérablement accru. J'ai beaucoup marché mais presque tout le monde en faisait autant.
    Entre temps, j'aurai reçu un SMS d'encouragement de mon fils aîné : 'Good job Dady !'. Eh oui, j'avais pris mon portable sur moi : pour leur faire part d'un éventuel abandon d'une part mais aussi pour les rassurer régulièrement sachant qu'ils feraient à pied l'ascension jusqu'à Plan Praz pour m'accueillir si me tenait l'idée d'aller jusqu'au bout.
  • Le premier ravitaillement solide à Vallorcine me laissera un super souvenir. Un sourire de Juanita pour la photo, 18 km déjà parcourrus et, à la vue de magnifiques tranches de... saucisson et de pain, je me laisse aller. Une puis deux, trois. A quatre, je me dis que ce n'est pas sérieux, félicite les bénévoles de leur gentillesse, bois un coup et repars direction le col des Posettes et sa longue ascension.
  • L'arrivée au col des posettes pour le deuxième ravitaillement liquide est un pur délice. Le Mont-Blanc nous fait face. C'est un paysage de rêve. Un bénévole sympa nous prend en photo moi et on double. Nous atteindrons l'aiguillette des posettes et ses 2200 m. en plus de 4 heures ! Nous n'en sommes qu'au 23ème Km ! Je passe un coup de fil aux miens : 'je suis toujours en course et je commence à y croire'.
    Jusque là, j'ai bien tenu et surtout sans douleur. Je sais qu'une longue descente m'attend avant la terrible remontée vers la Flégère puis Plan Praz. Je m'écarte du chemin pour faire quelques boules de neige et canarder mon Double...
  • Terrible, elle le sera cette descente. Terriblement dangereuse car parsemée de racines, cailloux et roches en tous genres. Longue et abrupte, elle finira par me faire mal même si je double pas mal de coureurs. Mon mollet commence à tirailler. Je cours les yeux rivés au sol, ne compte pas le nombre de fois où je butte sur un obstacle, retrouvant l'équilibre au prix de surprenantes accrobaties. C'est clair, la fatigue commence à pointer. Un coureur fera même 3 chutes terribles sous mes yeux. Nous le ramasserons à chaque fois un peu plus écorché.
    C'est au fil de cette descente que la chaleur va commencer à se faire terriblement sentir. Heureusement, mon camelbak gardera ma boisson bien fraîche et je plaindrais les concurrents partis soit avec une simple petite gourde soit sans rien du tout car je vais souffrir énormément de la chaleur donc boire énormément sur toute la fin de parcours.
  • Fin de la descente et un contrôle : poèle à frire pour titiller la puce tapie derrière mon dossard et je repars de plus belle. Les espaces entre les coureurs sont maintenant importants et souvent je me retrouve seul sans le moindre coureur en point de mire.
    J'ai lâché mon Double et la Tortue dans la descente. Je ne bénéficie donc plus du GPS de mon Double et n'aurai plus la moindre indication kilométrique jusqu'à la Flégère. Dur, trés dur de ne pas savoir où on en est au moment où la machine commence à donner de francs signes de fatigue.
    Passage à Tré-le-Champs pour le deuxième ravitaillement solide : une petite tranche de saucisson seulement car mon estomac lui aussi commence à accuser le coup. Je sais que j'en suis à peu près au 30ème. Là, je commence à voir les dégats causés par la course. Je ne saurai dire combien sont là, assis, l'air épuisé. Je demande à une bénévole quelle est la barrière horaire : elle me répond que j'ai 35 minutes d'avance. Seulement 35 minutes et il reste la longue 'ascension finale. Je ne traîne pas.
  • Pour moi commence alors une terrible galère en solitaire. Un mois sans courir avant un marathon : c'est maintenant qu'il faut passer à la caisse. Je sais que je manque de foncier et que désormais la tête va devoir prendre le relais. Je m'accroche à tous les encouragements possibles, à tous ces promeneurs qui s'écartent pour me laisser passer en me soufflant quelques mots de réconfort. Je souris à chaque fois moi aussi mais je pense que l'effort doit se lire sur mon visage.
    La montée est bien trop raide. Tout le monde marche. Beaucoup s'arrêtent faire une pause. Les visages sont marqués. Je refuse de m'arrêter avant La Flégère tant j'ai peur de ne pas repartir.
  • La Flègère, une montée interminable qui se termine par un véritable mur de quelques dizaines de mètres. Mur au sommet duquel des spectateurs tapent dans les mains pour m'encourager. J'arrive tremblant au sommet et décide de m'accorder une pause. Je m'échoue sur une marche, le cardio est monté à... 196 ! 7 heures que je suis en route !
    A regarder les coureurs assis et leurs mines décomposées, je me reprends rapidement. Je suis sûr que beaucoup se sont arrêtés là. J'appelle mon fiston à nouveau, lui dit qu'il me reste 5 km que tout va bien, que dans 50 minutes, je serai à l'arrivée.
    En fait il m'en reste 6 et je mettrai 1h08 pour les franchir. Car, rares sont maintenant les endroits où je peux trottiner. Je ferai une deuxième chute sans gravité dans un 'escalier' en rondins en bord d'apic. Trouille de ma vie !
    Je perdrai encore un peu de temps à aider un concurrent pris de vertige dans cette même descente terriblement dangereuse au bord du vide.
    Enfin, alors que je traverse un champs d'éboulis de roches, je serai forcé à l'arrêt par une crampe à l'intérieur de la cuisse dont je ne saurai comment me débarasser.
    Seul point positif à cet instant, mon mollet : lui qui commençait à me faire mal sur la fin de la descente, j'ai fini par l'oublier dans cette longue route vers la Flégère.
  • Enfin, je vois se profiler les drapeaux de l'arrivée. Un promeneur me dit qu'il reste 2 Km. En fait, il en reste 3, une longue descente où je trouve les ressources pour trottiner et la dernière ascension.
    Mes jambes n'en veulent plus. Mon estomac non plus. Ma tête n'arrive plus à faire la loi. Interminable cette dernière côte. Je fait des arrêts tous les cent mètres. Mes nerfs commencent à lâcher.
  • Quel bonheur lorsque je vois arriver à ma rencontre Catson, Basilio et mon petit Nicolas. Il m'encouragent comme c'est pas possible. L'épaule de Catson m'évitera une nouvelle chute. J'entends le speaker m'encourager. Basilio lui a soufflé que j'étais blessé alors lui aussi il y met du sien.
    Comment ai-je fait pour courir sur les derniers mètres et franchir la ligne, je n'en sais rien. Machinalement, je coupe mon chrono.
    Comme un robot, j'avance pour recevoir ma médaille. Nouveau coup de poèle à frire pour arrêter officiellement mon chrono, valider mon exploit. Car pour moi, c'en est un. Les 8h08"08' affichées au cadran de mon polar sont les plus beaux chiffres que j'aie jamais eu la fierté d'annoncer. Le 8 porte bonheur en Chine. Qui me l'a dit, je ne m'en souviens plus.
  • Tout de suite Isabelle que j'embrasse avec bonheur et mes deux fistons m'entourent et me réconfortent. Mais je suis mal, trés mal. Je demande à m'allonger sur une civière de la Croix Rouge pour récupérer.
    Et là, les nerfs lâchent pour de bon. Des larmes que je ne peux contenir roulent sur mes joues. J'ai besoin d'évacuer toutes ces semaines de doute et cette terrible fin de course.
    10 minutes plus tard, j'ai repris le dessus. J'ai soif et je boirai la meilleure des bières que j'aie jamais bue jusqu'à présent. Une bière brassée sur place avec l'eau des sources locales...
    Au fil des arrivées, je retrouverai mes différents compagnons de route. Je ne peux vous décrire la joie de tout le monde, les embrassades et les inévitables photos.
  • Mon plaisir n'est cependant pas complet. Je retourne vers la ligne d'arrivée et j'attends. La Tortue arrive mais pas mon Double. Le temps tourne et la limite horaire se rapproche.
    Nicolas repèrera en premier sa casquette orange. Je dis au speaker d'encourager mon Kéké, que c'est mon meilleur copain, qu'on a fait des tas de marathons ensemble, qu'on va bientôt se pacser. Je lui demande le micro qu'il me passe sans rechigner. Et j'essaye alors de donner à mon double un peu de forces pour ces derniers efforts.
    N'y tenant plus, à la stupéfaction de ma Moitié qui me demande de ne pas bouger, je redescendrai finalement à sa rencontre pour faire à ses côtés les derniers mètres. Un ralenti du diable que je vous montrerai dans ma prochaine vidéo.
    Tout le monde est arrivé, mon bonheur est complet. Nous félicitons le dernier qui arrive quelques instants plus tard.
  • Nous redescendrons tous par le télécabine accompagnés par les bénévoles qui récupèrent les sacs dont les propriétaires n'ont pas franchi la ligne d'arrivée.
    Nous apprendrons plus tard que sur 1380 au départ, seuls 1140 ont été classés (Presque 18% d'abandons, c'est énorme).
  • Trop fatigués, mon Double et moi n'iront pas au buffet qui était offert au coureurs préférant une bonne douche et un peu de repos.
    Dernière épreuve du jour, le restaurant CLM. Encore plus d'une trentaine au rendez-vous, nous passerons à nouveau un bon moment à La Calèche pour une pierrade organisée par Juanita. Un gouffre à la place de l'estomac, je me suis goinfré n'ayons pas peur des mots. Tout fier, je remettrai officiellement mes caramels à mon Double, Barbie offrant les siens à La Tortue. La récente mais inévitable tradition fût donc respectée.
    Une photo des médaillés à la sortie puis un dernier verre mettront un terme à une journée épuisante mais riche en satisfactions.
  •  Le bilan :

  • En premier lieu, je ne cache pas la joie et la satisfaction que j'ai éprouvées à boucler une telle épreuve. Courir plus de 8 heures aprés 4 semaines sans entraînements, je ne donnais pas cher de ma peau avant le départ.
    Le parcours offre de superbes panoramas (col des posettes, La Flégère et arrivée à Plan Praz).
    L'ambiance de course était vraiement chouette. Parler fait un immense bien à tout le monde sur de telles durées de course et une grande solidarité entre coureurs s'installe au fil des kilomètres, des chutes et des difficultés de chacun.
  • Côté équipement, mes ASICS spécial trail et mon Camelbak 1,5l. (rempli d'eau + 2 sachets de boisson énergétique) ont remplis leur rôle. Peut-être les bâtons m'auraient-ils aidés mais sans expérience, j'ai préféré m'en abstenir.
  • Mais il faut être réaliste. Cette course n'a de marathon que la distance. C'est un véritable trail, une véritable course de montagne. Aux antipodes de mes terrains de jeux habituels, cette épreuve fût bien plus rude que tout ce que j'avais imaginé.
    J'avais bien imaginé marcher dans les côtes trop raides mais j'étais loin du compte. Je n'ai pas l'habitude de courir dans les cailloux, les roches et les racines et, de peur de chuter, j'ai souvent préféré marcher. Impossible dans les descentes de faire autre choses que de garder les yeux rivés au sol.
    Certains passages en bords d'apics sont même dangereux si on considère qu'à certains moment on se retrouve seuls. Que se passerai-t-il en cas de chute d'un concurrent ? Mieux vaut ne pas y penser et intégrer ce point aux risques de la course en montagne
  • Autre inconvénient, sans les indications du GPS de mon double, j'ai couru la seconde partie sans aucune informations sur les kilomètres et dénivelés parcourus, dur pour le moral quand la fatigue commence à prendre le dessus.
  • Souvenez-vous, j'hésitais entre deux maximes latines pour donner un titre à mon récit : "Vae victis"...Malheur aux vaincus ou "Gradatim vincimus"... Pas à pas, nous vaincrons.
  •  Un peu de tourisme :

  • La ville et ses alentours sont riches en activités, visites et randonnées. Nous n'aurons pas le temps de tout faire en une petite semaine (amputée d'une journée à cause de la pluie).
  • L'aiguille du midi : un peu cher mais sincèrement, à 3842m., la vue sur les sommets alpins y est exceptionnelle, l'ascension en télécabine vertigineuse.
  • Montenvers et la Mer de Glace : le matin nous avons pris le train à crémaillère jusqu'à Montenvers, sommes descendus à pied jusqu'à la grottre creusée à même le glacier (il y a un télécabine pour les moins courageux). Après un pique-nique en forêt, nous sommes rentrés à pied jusqu'à Chamonix (environ 1h45).
  • Servoz et les Gorges de la Diosaz : profitant de la gratuité des bus et trains avec la carte d'hôte (qui offre d'autres avantages : nous avons testé le tarif réduit pour la piscine), nous avons pris le TER jusqu'à Servoz (30 minutes). Là, nous avons visité le superbe site des gorges de la Diosaz (1h30 environ) puis sommes partis randonner en direction du Lac Vert.
Vos messages
U09/06/2008
symphorien
Je te souhaite bon rétablissement pour être au top pour ton 3éme arathon de l'année et pas des moindres cette fois!
Je te souhaite aussi bien du courage pour cette épreuve qui s'annonce plutôt hard mais à CLM rien n'est impossible!!! EL
U13/07/2008
pconvert
pas facile facile dans ces conditions , le MMB !
ce sont des terrains très exigeants qui demandent d 'être fin prêt ... la montagne ne s' improvise pas , mais hélas , on ne maîtrise pas toujours sa condition physique ;-(
alors : y aller ? ne pas y aller ? terminer à tout prix ? éternelle question ....
la réponse appartient à chacun d 'entre nous ...
merci pour ton beau reportage ! +++ (j'y ai repris quelques photos de ma-tortue ..)et la grande qualité de ton site !
dèjà impatient de te retrouver !
U30/07/2008
laurence perrot (marmotte01)
Super compte rendu, super vidéo. Merci à toi de m'avoir fais vivre des moments de bonheur. Nul doute que j'y serais l'année prochaine.Marmotte01
Merci !

Envie d'en parler, de me faire part de vos impressions ou d'en savoir plus pour, qui sait, y aller prochaînement. Ne vous privez pas il est là pour ça... mon livre d'or.

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